Une commissaire du gouvernement a donc fini par céder à la pression. Et depuis, la classe politique se perd en conjectures. Chacun aura également instrumentalisé une nomination au service d’un agenda particulier, au service d’intérêts partisans.
Calcul particulier
Premier à le demander, le président du MR aura donc obtenu la démission de Ihsane Haouach. Mais à quel prix ?
Ecolo n’a-t-il pas utilisé une personnalité pour tenter de marquer des points (?) politiques, avant de la laisser tomber, sous la pression ?
Le Premier ministre a d’abord endossé cette nomination, avant d’en minimiser la portée, puis sorti le carton jaune et renvoyé sa secrétaire d’État à ses responsabilités. Sa majorité a tangué. On retiendra également la violence des propos, notamment entre partenaires de la coalition fédérale.
Dans l’opposition, l’affaire aura également divisé le cdH et alimenté la rivalité entre N-VA et Vlaams Belang.
Enfin, l’emballement final sur un rapport de la Sûreté de l’Etat que (presque) personne n’a lu, aura surtout généré beaucoup de fantasmes, d’insinuations et de rumeurs qui n’honorent personne. Cela renvoie chacun à ses propres responsabilités, bien au-delà de cette dernière affaire, d’un débat que la démocratie belge a toujours bien soin d’éviter. Une démission collective sur une réelle question de société, du " vivre ensemble " que la classe politique belge n’a jamais voulu affronter, toute à ses calculs électoraux à court terme. Cachez ce voile que l’on ne saurait voir…
Échec collectif
Le débat de fond sur les libertés fondamentales reste tronqué, notamment par les intérêts particuliers.
Georges-Louis Bouchez a décidé de donner un coup de barre à droite à sa formation politique, ce qui fait même grincer des dents au sein de sa formation. En s’en prenant violemment à la désignation de madame Haouach, d’en faire un marqueur idéologique sous vernis de laïcité, le MR a assumé son positionnement quitte à se mettre en porte-à-faux au sein de la coalition fédérale, mais risque d’être mis en contradiction quand on évoquera d’autres confessions.
Pour Ecolo, soit il n’a pas vu que la désignation pouvait poser un problème, soit il a voulu imposer sa marque mais dans les deux cas, les Verts ont commis une faute. De plus, Ecolo s’est montré incapable d’assumer cette désignation jusqu’au bout, préférant un murmure discret. Enfin, la secrétaire d’État Schlitz porte la responsabilité politique de ce fiasco.
De son côté, le Premier ministre a surtout tenté initialement de tenir loin de son gouvernement la question du port du voile. Minoritaires en Flandre, avec un Vlaams Belang en pleine forme, les partis néerlandophones du fédéral, mal en point en outre dans les sondages, voulaient surtout éviter de devoir tenir ce débat, qui finalement leur revient en pleine figure.
Le PS a opté pour le profil bas, incapable de fixer une ligne claire en son sein sur cette délicate question.
Longtemps, chacun n’a pas voulu voir ou évité de décider, de fixer des choix. Souvent, faute de consensus, il est vrai. Mais cette faillite démocratique globale a fini par rattraper une classe politique incapable désormais de trouver une issue qui puisse bénéficier d’un large soutien et qui creuse encore les divergences entre les aspirations des uns et des autres.