Belgique

Affaire Duferco : Serge Kubla doit s’expliquer au tribunal, aux côtés de deux dirigeants de l'aciériste pour lesquels il a travaillé

Comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu même s’il fait froid le 24 février 2015 lorsque Serge Kubla est placé en détention à Saint-Gilles. Par un communiqué du parquet fédéral arrivé dans les rédactions : les journalistes découvrent la raison pour laquelle l’ancien ministre wallon est en détention provisoire puis inculpé. Le communiqué évoque des soupçons de corruption d’agents publics congolais pour "favoriser l’évolution d’investissements importants dans le secteur du jeu et des loteries".

Une remise d’argent dans une enveloppe

Même si Serge Kubla ne passera que deux nuits en détention préventive, l’effet médiatique produit lors de sa sortie de prison couplé aux éléments mentionnés par le parquet, à savoir la remise d’une enveloppe de 20.000 euros cash à l’épouse d’un ex-ministre congolais suffiront à le bannir définitivement de la vie politique belge.

Lâché par le MR, il perd son dernier mandat de bourgmestre de Waterloo.

La reconversion du député wallon

Serge Kubla reconnaît rapidement cette remise d’enveloppe d’argent aux enquêteurs mais il affirme n’avoir servi que d’intermédiaire et ce à la demande d’un ancien comptable de Duferco. Il nie en revanche toute participation à un quelconque pacte de corruption au Congo. Le contexte de cette remise d’argent sera dévoilé plus tard à mesure que l’enquête progresse et permet de comprendre les liens que Serge Kubla a maintenus au fil du temps avec les dirigeants de l’aciériste Duferco.

Les liens que Serge Kubla a maintenus au fil du temps

Lorsqu’il quitte sa fonction ministérielle en 2004, durant son mandat de député wallon jusqu’en 2014, les contacts ne seront jamais rompus avec le bourgmestre de Waterloo. Celui-ci mettant en place dit-il graduellement "sa reconversion" vers le privé au moyen d’une société dont il est officiellement administrateur depuis 2009.

C’est dans ce contexte que l’enquête mettra au jour des transferts d’argent depuis cette société de consultance basée à Malte et destinée à facturer ses services de "lobbying", principalement en faveur de Duferco. La destination de Malte n’aurait été choisie selon Serge Kubla que pour son régime fiscal particulièrement avantageux à l’époque. Rien d’illégal s’était-il défendu, l’Europe autorisant ces régimes fiscaux différents entre Etats.

Serge Kubla lobbyiste pour Duferco en Belgique et en Afrique

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Personne n’a oublié la crise de la sidérurgie wallonne et le rôle que Duferco a joué dans la reprise des installations de Tubize et La Louvière. Face aux conditions mises par l’Europe, le groupe Italo-Belge apparaîtra alors comme un sauveteur providentiel.

L’enquête a mis en évidence que lorsqu’il était toujours député wallon Serge Kubla aurait favorisé à partir de 2009 les projets d’investissements de Duferco en Wallonie.

Il est accusé notamment de prises d’intérêt dans le cadre de deux partenariats qui concerne le réaménagement du site des anciennes Forges de Clabecq, le partenariat entre la SOGEPA et DUFERCO Wallonie et le partenariat entre MATEXI et Duferco Belgium.

Des investissements hasardeux en Afrique, d’importantes pertes

Mais l’essentiel des facturations et des montants identifiés par l’enquête concerne des investissements hasardeux en Afrique centrale. Duferco voulant diversifier ses zones d’activités et investir à long terme dans des outils industriels, des terrains miniers mais aussi plus inattendu des participations dans la loterie nationale congolaise.

Pour les jeux de hasard, une société (SEJ) mise en place par Stéphane Dewitte, l’ancien comptable de Duferco devait s’associer avec la SONAL, la société gérant la loterie nationale congolaise. Mais ce projet a avorté dans des conditions restées troubles. Avec au final, d’importantes pertes d’argent pour Duferco.

Stéphane Dewitte, l’ancien comptable de Duferco disparaît au Congo

Si l’enquête mettant en cause Serge Kubla et Duferco émerge médiatiquement avec l’arrestation de Serge Kubla en février 2015, elle a en réalité commencé plus tôt. Durant l’été 2014, la famille et les proches de Stéphane Dewitte, l’ancien comptable de Duferco, viennent signaler sa disparition au Congo. Il n’a plus donné signe de vie depuis plusieurs semaines.

Pas de feu vert pour enquêter au Congo

Un mois après ce signalement, l’ambassade de Belgique informe le parquet fédéral que Stéphane Dewitte a très probablement été assassiné. Une enquête est ouverte au parquet fédéral mais elle s’enlise rapidement, les enquêteurs n’obtenant pas de feu vert pour enquêter au Congo.

Cette enquête va entraîner coté belge la découverte de remises d’argent en cash à des personnalités congolaises. Remises d’argent où il apparaît que Serge Kubla a été l’associé du comptable Stéphane Dewitte dans plusieurs transactions liées à la société Duferco.

Le volet disparition à l’origine de l’enquête pour corruption

Ce nouveau volet sera disjoint du volet disparition et donnera lieu à l’ouverture de la procédure pour corruption et blanchiment qui est jugée à Bruxelles. Sans qu’à ce stade, on sache si ces deux dossiers sont liés, un volet sentimental étant évoqué aussi comme possible mobile de la disparition du comptable.

Des millions d’euros disparus dans des opérations douteuses

Aujourd’hui, deux cadres importants de Duferco, Massimo Crocci et Antonio Gozzi figurent parmi les prévenus. A leurs côtés sont également poursuivis Duferco en tant que personne morale et l’ancien comptable Stéphane Dewitte. Cette disparition pèsera sur les débats qui s’ouvrent au tribunal de Bruxelles. Son absence quasi certaine à l’ouverture du procès n’aidera pas la justice à clarifier les zones d’ombre qui demeurent dans l’enquête, notamment l’identification des destinataires finaux des sommes versées et les contreparties attendues.

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