Plusieurs associations et organisations citoyennes tirent la sonnette d’alarme : ceux qui fuient la guerre en Ukraine mais qui ne sont pas citoyens ukrainiens… ne bénéficient pas de la même protection, aujourd’hui en Belgique. Comment expliquer cette situation ? La Belgique manque-t-elle a ses devoirs ? Déclic a voulu y voir clair.
Une protection sélective
Ils ont fui la guerre. Ils vivaient, pour certains, en Ukraine depuis de longues années et pourtant, une fois arrivés à Bruxelles, ils ne peuvent pas bénéficier de la protection temporaire accordée par l’Union Européenne. C’est Mehdi Kassou, porte-parole de la plateforme citoyenne BXLRefugees qui interpelle les médias et les autorités sur ce qu’il considère être une injustice : " on a affaire à des personnes qui n’ont pas la nationalité ukrainienne mais qui vivent en Ukraine, qui y ont leur famille, leur travail, leur logement et qui ont du tout abandonner pour fuir les bombes. Pourtant, aujourd’hui ça ne suffit à leur donner les mêmes droits qu’aux nationaux ukrainiens qui arrivent ici ".
Et Mehdi Kassou pointe plusieurs exemples dont celui d’un habitant de Kiev, camerounais d’origine qui enseigne depuis 7 ans dans une école supérieure de Kiev. " Ce qu’on lui a signifié c’est que comme il n’a pas la citoyenneté ukrainienne, on doit d’abord vérifier s’il ne pourrait pas plutôt retourner au Cameroun, plutôt que de rester en Belgique. Il a été envoyé au petit château, avec tous les autres demandeurs d’asile ".
Le flou de la directive
La Belgique manque-t-elle pour autant à ses devoirs humanitaires ? Au cabinet du secrétaire d’état à l’Asile et du côté de l’Office des Etrangers, on se retranche plutôt derrière la directive qui régit la protection temporaire pour les Ukrainiens et qui stipule ceci, en son article 11:
- La présente décision vise à instaurer une protection temporaire pour les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine qui ont été déplacés le 24 février 2022 ou après cette date à la suite de l’invasion militaire des forces armées russes qui a commencé à cette date. Une protection temporaire devrait également être instaurée pour les ressortissants de pays tiers autres que l’Ukraine, qui ont été déplacés d’Ukraine le 24 février 2022 ou après cette date, et qui bénéficiaient en Ukraine du statut de réfugié ou d’une protection équivalente avant le 24 février 2022. En outre, il est important de préserver l’unité des familles et d’éviter des divergences de statut entre les membres d’une même famille. Il est donc nécessaire d’instaurer également une protection temporaire pour les membres de la famille de ces personnes, lorsque leur famille se trouvait déjà en Ukraine et y résidait déjà au moment des circonstances entourant l’afflux massif de personnes déplacées.
Un texte qui accorde donc la protection temporaire aux citoyens ukrainiens, à leur famille ainsi qu'aux personnes disposant, en Ukraine, d'un statut de réfugié. Ceci-dit, pour plusieurs associations et ONG, la Belgique pourrait quand même décider d'octroyer la protection temporaire aux résidants qui n'ont pas la nationalité mais qui vivent depuis longtemps en Ukraine. Ils s'appuient en cela sur un passage de l'article 12 de la même directive:
- Il convient en outre de prévoir la protection des apatrides, et des ressortissants de pays tiers autres que l’Ukraine, qui peuvent prouver qu’ils résidaient légalement en Ukraine avant le 24 février 2022, sur la base d’un permis de séjour permanent en cours de validité délivré conformément au droit ukrainien, et qui ne sont pas en mesure de retourner dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables. Cette protection devrait prendre la forme soit de l’application de la présente décision à leur égard, soit d’une autre protection adéquate en vertu du droit national, selon que chaque État membre en décidera. Les personnes souhaitant bénéficier de la protection devraient être en mesure de prouver qu’elles remplissent ces critères d’éligibilité en présentant les documents pertinents aux autorités compétentes de l’État membre concerné. Si ces personnes ne sont pas en mesure de présenter les documents pertinents, les États membres devraient les réorienter vers la procédure appropriée.
Chez le Secrétaire d'Etat Sammy Mahdi, on reconnait une difficulté et un flou en la matière "mais on veut attendre des lignes directrices de l'Europe avant de prendre attitude" précise la porte-parole Sieghild Lacoere. Certains autres états n'ont pas attendu. L'Espagne, par exemple, a d'ores et déjà décidé d'accorder la même protection à tous ceux qui fuient la guerre en Ukraine, citoyens et résidents.
Plus de détails dans la vidéo ci-dessus, extrait de Déclic votre Talk Info chaque soir à 17H sur La Première et à 19h sur La Trois en télé.