Pourtant, au soir du 30 juin 1960, date de l’indépendance, les Congolais espéraient mieux. Beaucoup mieux. Après des années de colonialisme, ils aspiraient à un avenir épris de liberté et de prospérité, comme le rappelait le Premier ministre : " Nous allons établir ensemble la justice sociale et assurer que chacun reçoive la juste rémunération de son travail. Nous allons montrer au monde ce que peut faire l’homme noir lorsqu’il travaille dans la liberté et nous allons faire du Congo le centre du rayonnement de l’Afrique tout entière. Nous allons veiller à ce que les terres de notre patrie profitent véritablement à nos enfants."
Mais la réalité n’est pas vraiment celle espérée. "L’indépendance, c’était bien. Mais tous les problèmes et les désordres qu’a connus le pays viennent de cette indépendance qui n’était pas assez bien préparée", explique Florimond Muteba, Président du Conseil d’administration de l’ODEP, l’Observatoire de la dette publique.
Florimond Mutemba Tshitengue avait 10 ans au moment de l’indépendance" J’ai 70 ans, et mon activité est essentiellement orientée vers la grande plateforme de la société civile, créée il y a 10 ans : " L’observatoire de la dépense publique "….Je dirais beaucoup d’amertume car cela ressemble à 60 années gaspillées, gâchées. Quand vous prenez l’exemple d’un pays comme la Chine, lorsque la révolution triomphe en 1948, (et nous en’60),… La Chine était un pays sinistré, mais quand on voit ce qu’ils ont fait en 72 ans, et que l’on voit ce que nous avons fait en 60 ans, franchement ce sont des années complètement gâchées. Aujourd’hui la Chine, sur seulement 12 ans de différence, est devenue la première puissance économique mondiale. J’ai beaucoup d’amertume en parlant de ça. Et que de sacrifices, car nous avons perdu Patrice Lumumba et beaucoup d’autres qui avaient à cœur l’indépendance et le développement de ce pays. Ensuite, à part la petite parenthèse de Laurent Désiré Kabila, des dirigeants se sont succédés et on n’a rien vu de bon pour le développement de notre pays, et ce, y compris avec le président actuel. Les scandales financiers ne font que s’accumuler à la présidence de la république. Ça n’augure pas de lendemains qui chantent pour le Congo."
A 70 ans, il se rappelle ce moment de l’histoire mais constate aujourd’hui les failles, présentes depuis des années. "Depuis tout ce temps, on a eu le temps de se ressaisir nous-mêmes. Mais on ne l’a pas fait. Ce n’est pas la faute de l’occident si 60 années après, nous sommes toujours au même niveau. C’est un faux discours que de dire ‘passez il n’y a rien à voir’, ‘laissez-nous faire ce que nous voulons de notre peuple’, ‘laissez-nous piller notre pays comme nous voulons’".