Les experts-comptables sont débordés. Ils viennent de boucler, la semaine passée, la TVA pour le troisième trimestre. Cette semaine, c’est la date limite pour les déclarations fiscales d’entreprises. Dans quinze jours, ils doivent remettre l’impôt sur les personnes physiques — ce que nous, comme particuliers, on remet sur le web en juillet.
Et le problème, c’est que dans cette période très dense, l’informatique ne suit pas, à tel point que 3500 comptables ont déjà signé une pétition dans laquelle ils réclament des outils fiables, accessibles au moment où ils en ont besoin.
"On a Tax-on-Web qui bug et MyMinFin qui bug", résume Morgane Depriez, comptable à Ham-sur-Heure. "Les validations des TVA prenaient plusieurs heures pour certains, alors qu’en général ça se fait en quelques secondes. Ici, Tax-on-Web n’était simplement pas trouvable, la page n’était pas trouvable. Ce matin, Biztax était indisponible. Ça, c’est ce que nous vivons tous les jours, quotidiennement. Ça a pour conséquence que beaucoup de comptables sont au bout du rouleau, font des heures à n’en plus finir, travaillent le soir, la nuit, pour avoir accès à des e-services dans des heures dites creuses, travaillent pendant les vacances, ne voient plus leur famille. Je reçois des messages de personnes qui en ont marre, qui veulent simplement arrêter la profession."
Cela a des conséquences en cascade sur les clients, parce que si les comptables sont en retard, ce sont bien sûr les clients, les entreprises, les PME et les petits indépendants qui s’exposent à des amendes.
Un problème récurrent ?
Les problèmes informatiques touchent ces plateformes tous les ans depuis qu’elles existent. Mais l’année passée, avec le Covid, les indépendants ont eu des droits passerelle, les entreprises ont eu des primes, etc. Cela rend les déclarations un peu plus compliquées que d’habitude à remplir.
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Les inondations de juillet ont également eu d’importantes conséquences financières pour les entreprises, avec des déclarations différentes à remettre.
Tout cela crée de la frustration quand les plateformes plantent.
"Lorsque ça ne va pas, on n’a aucun interlocuteur", remarque Yves Drapier, comptable à Liège. "On a juste une belle petite roue qui tourne ou un sablier qui tourne et on ne sait pas. Quand on essaie de joindre l’administration, on n’a pas de réponse. On ne sait pas planifier le travail de nos cabinets parce qu’on n’a pas confiance non plus dans l’accessibilité aux applications du SPF. Nous, ce qu’on demande clairement, c’est que la date ultime soit fixée, mais que s’il y a des bugs, ce délai soit automatiquement rallongé."
"Les mandats arrivent assez tard"
Il y a déjà eu une prolongation de 15 jours, en tout cas en ce qui concerne la déclaration d’impôts sur les personnes physiques. Quant aux problèmes informatiques, le SPF Finances reconnaît qu’il y a quelques ratés de temps en temps. Mais Florence Angelici, la porte-parole, l’assure, ils suivent la situation de près et surtout ils s’adaptent en conséquence.
"On sait, par exemple, à quel pourcentage on est des déclarations remplies par les comptables et les fiscalistes. Et donc, en fonction de ça, on va rajouter plus de serveurs sur telle ou telle application pour répondre à cette demande. Et on constate aussi, par exemple en monitorant, qu’au 30 juin, il y a moins de 1% des mandats qui sont complétés. Donc effectivement, les mandats arrivent assez tard", admet Florence Angelici.
Des comptables qui s’y prendraient donc assez tard alors que les plateformes desquelles ils se plaignent sont ouvertes depuis plusieurs mois, depuis mai dernier. Ce à quoi ces comptables répondent : "oui, c’est vrai, mais en mai-juin, on a beaucoup d’autres priorités, comme le dépôt des comptes annuels à la Banque Nationale, la TVA du deuxième trimestre, et il y a les vacances qui arrivent ". C’est donc logique qu’ils s’y mettent tous en même temps, autour de septembre-octobre. C’est maintenant qu’ils ont besoin que ces outils fonctionnent.